JE M’APPELLE ALZHEIMER – « AL » POUR LES INTIMES

Al et vous. Un membre permanent et à part entière de la famille. Il n’est pas en visite éclair. La première fois qu’il surgit, vous vous dites « Allez ! À bientôt ! […] À la prochaine ! ». Si vous saviez. La prochaine est déjà là sauf que vous ne le savez pas encore. Mais Al le sait. Mine de rien, il revient de temps à autre. Puis de plus en plus souvent. Mais toujours de manière inattendue. Parfois ses visites sont courtes mais intenses. Dérangeantes. Parfois brèves, presque anodines.

C’est vrai. Al est discret, presque invisible. Au début. Il vient vous rendre visite comme un cousin éloigné. Vous essayez de faire vos devoirs. De vous rappeler ce que vous savez sur lui. Vous échangez des banalités car cousin Al, vous connaissiez vaguement son existence. Vous êtes plus éloignés que proches. C’est Mala qui vous en parle de temps à autre. C’est comme vous dire que la terre est ronde. Vous le savez. On passe à autre chose.

Tiens. Al est là aujourd’hui. Vous ne saviez pas qu’il s’était annoncé. Vous essayez d’engager la conversation. Quelques fois il y a des bugs. « Il est temps que je m’en aille. Où sont mes clés bon sang ? ». Normal. Ce n’est pas grave. Allez on met ça sur. Rien en fait. Ça arrive à tout le monde, non ?

Puis vous commencez à en parler autour de vous. Histoire de savoir si vous vous faites des films. Bizarre. Les autres aussi vous en touchent un mot. Ils ont croisés Al qui a fait forte impression sur certains.

Puis vous prenez conscience qu’il est là. Non mais vraiment là. Chez vous. Mais vous ne comprenez pas pourquoi et pour combien de temps. « Al, tu ne penses pas qu’il est temps que tu rentres chez toi ? ». Oui. Car au début, vous restez poli. C’est une vague connaissance. Vague mais une connaissance quand même. « Je ne veux pas qu’il reste moi ! J’ai rien demandé !  […] « OK Alzheimer. Tu connaissais mes grands-parents. Mais nous. On n’est pas potes ! ». Oui vous l’appelez comme ça lorsque vous êtes fâché.